jeudi 10 janvier 2013

Les Chaudières : combien de chutes ?


1. Installations de Philemon Wright à Hull (Gatineau), sur la rive nord de l'Outaouais, en 1830, 
près des chutes des Chaudières (vue vers le SW). La Petite Chaudière est au centre de l'image ; 
la Grande Chaudière, plus à gauche, est masquée par l'arbre incliné et le bâtiment à gauche. Avouez
qu'il aurait été difficile de trouver un point de vue qui nous donne autant envie de voir de ces chutes
ce que l'artiste ne nous en montre pas... 

(Pour savoir de quelles Chaudières (avec majuscule) on parle ici, voir mes récents billets.)

Aquarelle de Thomas Burrowes ; titre original : Hull, (Lower Canada), on the Ottawa River; 
at the Chaudier [sic] Falls, 1830. Archives publiques de l'Ontario, C 1-0-0-0-6. Le «sic» n'est pas de 
moi ; par contre, c'est bien moi qui ai «déjauni» l'image. Voir cette autre représentation du même site 
à la fin de ce récent billet (tableau de DuVernet, 1823).

Les piles brunes sur la terre ferme et dans l'eau sont des lits de calcaire gris. Une sorte de 
tabou empêchait apparemment les artistes du XIXe s. de représenter ce calcaire autrement qu'en
ocre ou en brun. Les différentes teintes de gris n'étaient pas encore à la mode.

* * *


Combien y a-t-il de chutes aux Chaudières ? On connaît la Grande et la Petite Chaudière. Et s'il y en avait (eu) une troisième, toute petite, en amont ? Une sorte de mini-Chaudière ?


2. Détail.

Voyez ce détail d'une aquarelle de T. Burrowes datée de 1830 (illustration no 2). Au centre du paysage, derrière l'île (à gauche), discrètement placée en retrait d'une pointe de terre qui s'avance dans la rivière, on entre-aperçoit une chute, pas très haute.

À moins que Burrowes aie voulu représenter des rapides ? Il existe bel et bien des rapides en amont des chutes des Chaudières, les petits rapides des Chaudières, à plus d'un km de l'endroit où l'auteur de l'aquarelle a planté son chevalet.

Un km, alors que les petites chutes de notre aquarelle semblent beaucoup plus près, même s'il est difficile d'être affirmatif devant cette œuvre d'amateur.


3. Détail encore plus détaillé (non «déjauni»).


Cet autre détail, plus serré (illustration no 3), permet au moins d'affirmer qu'il s'agit bien d'une chute, et non de rapides. Or, à ce que je sache, personne, explorateur, géographe ou historien, n'a jamais mentionné cette mini-chute.

Chose trop insignifiante que ce prodrome de la Grande Chaudière pour seulement mériter une mention ?

Diane Aldred (1994, p. 87) affirme que la construction d'un batardeau devant les chutes en 1868 aurait réduit la puissance (et l'étendue ?) des petits rapides des Chaudières en haussant le niveaux des eaux de la rivière.

On peut se demander si, en plus d'assagir les rapides, ce batardeau (et/ou les autres barrages, construits vers 1910 aux Chaudières), n'aurait pas effacé (ou noyé...) cette petite chute ?

La question reste, pour le moment et pour ma part, ouverte.


4. Le même site, vu à l'opposé (visée vers le NE), 182 ans plus tard. Le barrage des Chaudières 
est à droite ; la petite Chaudière se trouvait à peu près au fond de la baie, à gauche. Elle est à présent
dissimulée par les installations industrielles. Nulle île, nulle rapides : calme plat. 
(Photo décembre 2012, par mauvaises conditions météo.)

«Le barrage [des Chaudières] est construit en 1908 et mis en opération en 1910 dans le but de contrôler et d'uniformiser le niveau d'eau et d'ainsi répartir l'utilisation des forces hydrauliques. Cet ouvrage, qui épouse la forme géomorphologique originale de la chute, est un exemple rare de barrage à poutrelles de retenue. Il est un des premiers barrages hydroélectriques au Québec et le premier sur la rivière des Outaouais.» (Texte © Société du Musée canadien des civilisations.)


5. Rapides Farmer, en amont du pont Alonzo-Wright sur la Gatineau, à Gatineau. 
(Voir mes billets sur l'île Marguerite.) Faut dire que, parfois, la différence entre une chute 
et des rapides est assez subtile. (Photo juillet 2012, tout près d'une magnifique talle 
d'herbe à la puce ; voir ce billet.)


OUVRAGE CITÉ
Diane Aldred, Le Chemin d'Aylmer : une histoire illustrée / The Aylmer Road: An Illustrated History. L'Association du patrimoine d'Aylmer, Aylmer, Heritage Association, photographies par Alan Aldred, traduit de l'anglais par Claude Leahey et Rodrigue Gilbert, 1994, 256 p. ISBN 0929114124

5 commentaires:

  1. Court commentaire: je jubile! Cette histoire est tout simplement fascinante. Merci.

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    1. Merci. Je suis désolé par contre de ne pouvoir répondre à la question qui a justifié ce billet. Je ne vais quand même pas dévoiler la chute de l'histoire !

      Influencé par je ne sais trop quel délinquant des pixels, je me permets de déjaunir les vieilles images. L'éthique en souffre un peu, mais on retrouve le bleu du ciel.

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  2. Votre blogue est tout simplement génial !

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  3. Votre blogue est tout simplement génial !

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    1. En effet, mon blogue est. Jusque-là, c'est tout simplement incontestable. Ensuite, pour le qualificatif, on peut discuter. ;)

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