jeudi 12 juillet 2012

Déchaussement et herbe à la puce


On parle de déchaussement pour désigner la dénudation jusqu'à la racine d'une inclusion par dissolution progressive de la roche qui l'entoure, l'inclusion pouvant être une roche d'un autre type que celle qui l'englobe ou un simple cristal résistant.

Prévost et Lauriol (1994)* ont estimé le taux d'érosion régional du marbre sous l'action de l'eau courante à 0,94 cm par siècle (0,42 cm en eaux calmes).

* Voir cet ancien billet (dans ce blogue) et leur article (lien externe).

Ces valeurs – qu'il faut manipuler avec précaution, l'exposition aux agents érosifs de telle roche ayant pu changer au cours du temps – permettent d'estimer la durée de déchaussement des diverses d'inclusions du marbre local.

Qu'il soit bien entendu que les extrapolations que je risque, menées à partir des valeurs fournies par Prévost et Lauriol, ne prétendent à aucune rigueur scientifique et n'engagent que moi...


Marbre semé d'inclusions, île Marguerite, rivière Gatineau, à Gatineau.
Les roches de l'endroit montrent des marques évidentes d'érosion par l'eau courante. (Voir cet ancien billet dans ce blogue, ainsi que tous ceux consacrés à l'île Marguerite.)
La plate-forme de marbre contient des inclusions résistantes de granite et de gneiss. Ici, celle qui dépasse, un peu comme un nombril, du plancher de marbre, mesure environ 27 cm (hauteur). D'après le taux de dissolution du marbre dans l'eau courante donnée plus haut, on peut déduire, en supposant que cette inclusion ait été exposée sans interruption aux effets des eaux courantes de la Gatineau, qu'il a fallu environ 2870 ans pour la déchausser à ce point. (Photo 10 juillet 2012.)[Ajout (8 janv. 2015). – Rien ne prouve que l'extrémité de l'inclusion affleurait à la surface du à l'origine. Si elle était au départ entièrement incluse dans la roche, le taux de dissolution du marbre est plus élevé que ce que j'ai calculé.)

Bloc de marbre semé d'inclusions diverses, île Marguerite, Gatineau.
Même calcul, mêmes données (déchaussement de 27 cm), même résultat : temps d'érosion estimé là encore à 2870 ans. Combien de temps avant que cette inclusion ne se détache ? (Photo 10 juillet 2012.)


Autre point de vue.
(Photo 10 juillet 2012.)


Île Marguerite, Gatineau.
Résultat ? Le sol est jonché d'inclusions détachés du marbre (clapier). Note. – Une proportion importante des grains, gravier et pierraille ne «traînent» pas : ils sont à leur place, encore ancrés dans le marbre. (Photo juin 2010.)


Résultats
Il est intéressant de constater que le déchaussement des deux inclusions qui ont fait l'objet de mesures apparaît comme identique. Hasard, synchronicité ou erreur de ma part ? La mesure des dimensions de ces inclusions a été faite d'après photos, qui n'avaient pas été prises dans ce but, ce qui, dès le départ, oblige à tolérer une certaine marge d'imprécision. 

Comme mon projet n'était que d'obtenir une idée du temps d'érosion, même grossière, je crois que ces résultats ont leur intérêt.

Que ces blocs se soient déchaussés en 2570 ans ou en 3170 plutôt qu'en 2870 a moins d'importance que de pouvoir appréhender le phénomène dans la durée à partir d'observations grossières. (Et, bien sûr, de données plus exactes fournies par des géologues sérieux !...)

Je retournerai sur place prendre des mesures plus précises. (Affaire à suivre.)


Herbe à la puce


Attention à l'herbe à la puce près du site, le long de la rue Saint-Louis, côté rivière !


RÉFÉRENCE
Clément Prévost et Bernard Lauriol, 1994, «Variabilité de l'érosion actuelle et Holocène : le cas des marbres de Grenville en Outaouais Québécois», Géographie physique et Quaternaire, vol. 48, no 3, p. 297-304.
Article téléchargeable gratuitement à l'adresse suivante :
http://id.erudit.org/iderudit/033010ar

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