dimanche 27 juin 2010

Séismes de Val-des-Bois (2010) et de Mont-Laurier (1990) : comparaison (+ Ajout)

Sources des cartes : Lamontagne et al. (1994) et USGS (2010)

Cartes superposées : complément aux légendes
Carte en rouge et ajouts en noir
Source : Lamontagne et al. (1994)
Intensité des séismes : échelle de Richter
Le séisme de 1990 à Mont-Laurier est représenté par une étoile.
Les flèches noires (ajout) aident à repérer les limites de la Central Metasedimentary Belt (CM Belt) / ceinture centrale des métasédiments (CCM).

Carte en plusieurs couleurs
Source : USSG (2010)
Intensité du séisme : échelle de Mercalli modifiée

Zone couverte et géologie
La région représenté est partagée entre la province de Grenville (plus d'un milliard d'années) et les roches sédimentaires du Paléozoïque (moins de 540 millions d'années). Les divisons de la province de Grenville sont décrites dans le texte.
Les roches entre le Saint-Laurent et l'Outaouais, un peu en amont d'Ottawa et à l'E de cette ville, appartiennent au Paléozoïque.
Les failles du graben d'Ottawa-Bonnechère sont orientées NW-SE et SW-NE (le long de l'Outaouais et du Saint-Laurent).


Coïncidences
Je me suis amusé à superposer une carte extraite d'un article consacré au tremblement de terre de Mont-Laurier (1990) à celle de l'USGS sur le séisme de Val-des-Bois (2010) que j'ai reproduite hier dans ce blogue. Les données essentielles sur ces deux séismes de magnitude 5,0, échelle de Richter, sont à la fin de ce billet, dans «Rappel».

(Prière de vous reportez aux billets qui précèdent pour les explications qui manqueraient ici. – Lien ; lien et lien.)

Comme il était souligné dans mon billet d'hier, la zone d'intensité IV autour de l'épicentre du séisme de Val-des-Bois coïncide avec les limites de la partie S de la ceinture centrale des métasédiments (CCM) au Québec (Central Metasedimentary Belt ; CM Belt sur la carte de Lamontagne et al.).

La coïncidence est presque parfaite le long de la frontière W de la CCM. La zone de cisaillement de Labelle / Labelle Shear Zone, limite E de la CCM, semble moins étanche aux secousses telluriques et la zone d'intensité IV s'étend au-delà de cette ligne en contournant le «Morin Body» (massif d'anorthosite qui semble s'opposer à la propagation des ondes sismiques (?)). 

La bordure N de la zone IV, irrégulière, se moule sur la structure générale de la CCM, d'orientation N à NE. L'amincissement de la CCM vers le N pourrait contribuer à l'atténuation des ondes sismiques dans cette direction (?)

Au S de la rivière des Outaouais, la zone IV se confine aux sédiments du Paléozoïque qui subsistent dans le graben d'Ottawa-Bonnechère.

Sandwich
J'ai déjà expliqué que la CCM est composée de fragments de la croûte terrestre que des collisions entre continents ont empilé (le «sandwich» de mon premier billet du 26 juin) et charrié vers le NW. Les roches de la CCM et de la région au N de Montréal ont environ 1,3 milliard d'année ; celles à l'W et au N de la CCM ont entre 1,6 et 1,8 milliard d'années (localement 1,4 milliard).

Ces anciennes roches (relativement...) ont agit comme une rampe sur laquelle, entre 1,3 et 1 milliard d'années, la CCM et la été traînée (orogène de Grenville). La limite W de la CCM représente donc une discontinuité fondamentale entre de «jeunes» roches empilées et charriées vers le NW par dessus un «vieux» socle consolidé. Il est intéressant de constater que les ondes du séisme du 23 juin se soient brutalement atténuées en franchissant la limite de cet «empilement».

Au S, le séisme s'est contenté de secouer les roches sédimentaires du graben d'Ottawa-Bonnechère, délimité par des failles perpendiculaires à la propagation des ondes sismiques. 

Conclusion et quelques observations
Les séismes du SW du Québec se produisent de préférence dans la CCM, un empilement de pans de la croûte terrestre qui demeure fragile et sensible.

De façon plus générale, la sismicité dans Zone sismique de l'Ouest du Québec se concentre dans deux bandes : l'une, au S, se confine au graben d'Ottawa-Bonnechère ; l'autre, d'orientation NW-SE, qui se manifeste à l'intérieur de la CCM.

Les «?» indiquent des hypothèses personnelles qui ne s'appuient sur aucune source «autorisée»...

Dernière remarque : la carte de Lamontagne et al. montre qu'un séisme de 3 à 4 (éch. de Richter) s'est déjà produit presque qu'au même endroit que celui de Val-des-Bois. La carte ni l'article qu'elle accompagne n'en donnent la date ; je vais essayer de la découvrir.

Extrait du résumé de l'article de Lamontagne et al. (1994)
The last 10 yr [Note : article publié en 1994.] of recording have confirmed that most western Québec earthquakes, including the Mont-Laurier earthquake, occur in a northwest-southeast-trending zone inside the Central Metasedimentary (CM) Belt with most focal depths varying between 7 and 25 km. [...] The mid-crustal hypocentral depths of many earthquakes, the east-west trend of the fault plane of the Mont-Laurier earthquake, and variations in regional focal mechanisms all suggest reactivation of deep structural features, which may not have a surface expression.  [...] The western side of the activity does not end with the Central Metasedimentary Belt, a fact that implies that even though the factors controlling seismicity lie predominantly within the Central Metasedimentary Belt, the adjacent geologic domains are also seismogenic.

Rappel
Séisme de Mont-Laurier, QC
19 octobre 1990
Magnitude 5, échelle de Richter
Foyer : 11 km de profondeur
Orientation du plan de rupture : E-W, incliné à 70º vers le N

Séisme de Val-des-Bois, QC
23 juin 2010
Magnitude 5, échelle de Richter
Foyer : 16 km de profondeur (données préliminaires)
Orientation du plan de rupture : NNW-SSE, incliné à ?

Référence
Maurice Lamontagne, Henry S. Hasegawa, David A. Forsyth, Goetz G. R. Buchbinder and Mary Cajka, «The Mont-Laurier, Québec, earthquake of 19 October 1990 and its seismotectonic environment.» Bulletin of the Seismological Society of America, vol. 84, no 5, p. 1506-1522.


Ajout : observations en marge d'un billet simple et court
L'apophyse accrochée à la zone d'intensité IV, à l'E du «Morin Body» (massif d'anorthosite de Morin), suit d'assez près les différentes failles N à NNE qui parcourent le secteur où le graben d'Ottawa-Bonnechère fait sa jonction avec le rift du Saint-Laurent – rappelons que le premier n'est qu'un embranchement du second.

Il serait intéressant d'en savoir plus sur le «comportement sismique» du massif de Morin ; on a l'impression que, en son absence, la zone IV se serait étendue d'un seul tenant vers l'E, dans une contrée où abondent métasédiments et orthogneiss, ce qui aurait réuni d'un seul tenant les
compartiments de la province de Grenville formées de roches âgées de 1,3 milliard
d'années (voir plus haut dans le texte). 


De part et d'autre du réservoir Baskatong, on observe un étirement des contours de la zone IV selon la direction SW-NE d'un entrecroisement de «Major Shear Zone Boundaries».

À l'W, le long de l'Outaouais, la situation se complique par la présence de nombreuses failles du graben et de lambeaux de roches du Paléozoïque sur le Grenville. (Difficile de distinguer tout ça sur la carte, j'en convient.) Il est piquant de constater que les contours de la zone IV se pincent
précisément là où l'Outaoauis fait un coude vers le N...


La zone d'intensité V, dont je n'ai pas tenu compte dans mon billet, infléchit son contour circulaire pour, au S, suivre exactement la limite Grenville-Paléozoïque (ligne pointillée, peu visible, j'en conviens). Fait exception le petit lobe qui traverse l'Outaouais et effleure l'Ontario en suivant le tracé d'une faille du graben orientée NW-SE.

À l'E, la zone V se confond avec la bordure W de la zone de cisaillement de Labelle. C'est d'ailleurs à l'endroit où cette dernière rejoint la faille NW-SE évoquée ci-haut que se greffe le lobe qui pointe vers l'Ontario. À l'W, la zone V parvient tout juste à franchir une zone de cisaillement secondaire SSW-NNE.

En fait, la zone V dessine un cercle presque parfait confiné au «Southern Domain», composé de quartzite et de paragneiss, en effleurant le «Gatineau Domain», dominé par le marbre. «Elle évoque un o entre parenthèses, celles-ci étant représentées par les zones de cisaillement qui délimitent le Southern Domain.

Trop d'éléments ici m'obligeraient à sortir du cadre de ce billet que j'avais imaginé au départ simple et court...

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